Vers des pratiques plus sobres : des consommateurs prêts à se sacrifier pour l’environnement ?

La ville résiliente, La ville responsable
,
Responsabilité & engagement citoyen
Découvrez les principaux résultats de la thèse d'Inès Kolli !

Nécessité de basculer vers un mode de vie plus sobre

En 2017, les matières mobilisées pour la consommation intérieure française représentent 772 millions de tonnes (mt), soit 11,4 tonnes par habitant. Dans le même temps, la production de déchets représente 326 millions de tonnes, soit 4,9 tonnes par an et par habitant.

Face à ce constat, les organismes publics ont lancé de nombreuses initiatives afin de lutter contre le gaspillage lié à la surconsommation et favoriser l’économie circulaire. C’est le cas notamment de la démarche « zéro-déchet, zéro-gaspillage » proposée par certaines collectivités locales comme la Métropole Montpellier Méditerranée.

Une forte tendance à la déconsommation et au zéro-déchet

Pour réduire l’impact sur l’environnement et accélérer la transition écologique, les pouvoirs publics ainsi que les organismes nationaux, en particulier l’Ademe, ont déployé plusieurs mesures ciblant les consommateurs particuliers. Ces mesures visent à renforcer l’éducation à l’environnement, notamment sur les questions liées à la sobriété du consommateur, et à sensibiliser les consommateurs aux problématiques liées aux déchets, au gaspillage et à la surconsommation afin de les inciter à déconsommer plus et à adopter un mode de vie zéro-déchet.

 

Déconsommation et zéro-déchet
La démarche déconsommation et zéro-déchet repose sur plusieurs actions qui contribuent conjointement à la réduction des déchets et la minimisation des impacts néfastes de la consomma-tion sur l’environnement :
  • Éviter l’achat en accord avec le principe que le meilleur déchet est celui qui n’existe pas (ex. éviter les achats superflus, réduire la consommation de viande, d’internet, d’électricité, etc.)
  • Réduire au maximum les déchets à travers de multiples astuces et habitudes de consommation (ex. faire soi-même, pre-cycling, achat en vrac, etc.).
  • Réutiliser tout ce qui peut l’être (ex. vente, don et achat de produits en seconde main, réparation des objets, etc.)
  • Recycler ce qui reste et trier afin que les déchets puissent avoir une seconde vie.

Mais des consommateurs encore réfractaires au changement !

Des pratiques associées à des sacrifices importants
De nombreuses études soulignent la difficulté de faire changer les habitudes de consommation surtout lorsque les consommateurs ne sont pas motivés pour faire les efforts et les sacrifices nécessaires (Greenflex, 2019). Ce phénomène est qualifié par les chercheurs en marketing de green-gap entre d’une part les bonnes attitudes vis-à-vis la protection de l’environnement et d’autre part les faibles comportements réellement adoptés en faveur de l’environnement.
 
Les efforts individuels et collectifs sont-ils efficaces pour préserver l’environnement
Pour réussir à changer les pratiques et les modes de consommation, l’individu a besoin de croire que les efforts individuels et collectifs consentis seront efficaces pour préserver l’environnement.
Ce besoin est d’autant plus fort lorsque les pratiques sont associées à des sacrifices importants. L’efficacité perçue serait-elle un facteur qui incite le consommateur à agir malgré la forte perception des sacrifices ?

 

Des consommateurs qui ne sont pas tous motivés à agir
Les motivations qui poussent l’individu à agir en faveur de l’environnement sont diverses et se répartissent sur trois niveaux. Un niveau de motivation élevé. L’individu est autodéterminé à agir et adopte les pratiques par plaisir. Cette catégorie représente seulement 13% de la population française (Greenflex, 2019).
Un niveau de motivation moyen. Le consommateur agit en raison d’une pression interne (ex: sentiment de culpabilité et d’obligation) ou externe (ex. sollicitation sociale, pour obtenir
des récompenses ou éviter des sanctions). Cette catégorie représente la majorité de la population (67%).
Une amotivation qui caractérise une absence totale de motivation à agir en faveur de l’environnement.

Le sacrifice perçu : un frein à l’adoption des pratiques de sobriété

Une étude qualitative réalisée auprès de 22 personnes interrogées par le biais d’entretiens semi-directifs met en lumière plusieurs types de sacrifice.

Plusieurs questions ….

Qui sont les consommateurs qui perçoivent le plus de sacrifices ?
Quelles sont leurs caractéristiques individuelles ? leurs attitudes et croyances à l’égard de l’environnement ?
Comment les motivations et les préoccupations individuelles pour l’environnement affectent les évaluations du consommateur et potentiellement leurs intentions d’adopter les pratiques de zéro-déchet et de déconsommation ? 
 
 

Une étude quantitative réalisée sur un échantillon de 823 répondants

 

  • Étude 1 : Zéro-déchet (N = 414) 

  • Étude 2 : déconsommation (N = 409)

 

Principaux résultats

Le sacrifice perçu : un frein qui empêche le changement de comportement en faveur de la sobriété

Les résultats de l’étude montrent que les sacrifices de bien-être (perte de confort, perte de satisfaction liée à la consommation) et psychologique (déplaisir, frustration) sont les principaux freins à la sobriété.

  • Les stratégies de communication et de sensibilisation devraient se focaliser en priorité sur la réduction de ces deux freins.
 
Mais aussi, un facteur qui favorise les pratiques de sobriété !

Les résultats de l’étude montrent un effet positif des sacrifices cognitif, social et monétaire sur les pratiques de zéro-déchet et de déconsommation.

  • Exploiter le pouvoir persuasif des sacrifices positifs pour inciter les consommateurs à changer leurs modes de vie et de consommation.
 
Des perceptions différentes selon le degré de motivation et de préoccupation pour l’environnement

Le degré de motivation et de préoccupation pour l’environnement des consommateurs a une influence sur la perception du sacrifice.

Une forte motivation permet de minimiser les sacrifices négatifs (bien-être, psychologique) et de favoriser les sacrifices positifs.

Une motivation moyenne favorise les sacrifices positifs (cognitif, social). Cependant, celle-ci n’est pas suffisante pour réduire les sacrifices négatifs. Ce qui peut crée une situation de tension chez les individus. Cette tension peut vite conduire à l’abandon du comportement et l’absence de maintien régulier des pratiques dans le long terme.

Une motivation absente (amotivation) accentue la perception des sacrifices négatifs (de bien-être et psychologique) ce qui favorise une forte résistance au changement de comportement.

  • Le niveau de motivation de l’individu permet de cadrer les sacrifices perçus différemment : comme une transcendance chez les plus motivés et comme une perte chez les moins motivés.
 
Des effets différents de l’efficacité perçue selon le type de pratique

D’après les résultats de l’étude, la croyance que les efforts individuels (de changement d’habitude, d’apprentissage, et de mémorisation de nouveaux éco-gestes, etc.) sont suffisants et efficaces pour préserver l’environnement, incite les consommateurs à adopter plus régulièrement les pratiques de zéro-déchet. Cependant, les résultats indiquent que cette croyance n’est pas suffisante pour inciter le consommateur à la déconsommation.

  • Pour inciter le consommateur à la déconsommation, celui-ci doit être convaincu de l’efficacité des efforts du collectif et de la participation de tous à cet effort commun. 

 

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